Développer l’emploi en AB, un défi et une opportunité pour les territoires

Initier une gestion prévisionnelle des emplois et des compétences territoriales dans la filière agricole, participer au développement des solutions d’emploi partagé, soutenir l’organisation de formations adaptées, faire découvrir les métiers de la bio aux demandeur-euse-s d’emploi… Les pistes d’actions pour les collectivités locales sont nombreuses.

L’agriculture bio créée des emplois non délocalisables. Vu la progression des fermes bio dans l’agriculture nationale, les emplois générés par l’AB pourraient peser de manière significative sur le marché du travail.

En 2018, l’Observatoire Régional de l’Agriculture Biologique des Hauts-de-France a réalisé une étude identifiant toutefois des freins à l’embauche d’ordres financiers, administratifs ou relationnels. Parmi eux, deux semblent plus particulièrement peser sur les fermes régionales : les compétences nécessaires à l’accueil de salarié-e-s et les difficultés à trouver des candidat-e-s.

En outre, le passage en bio, pour beaucoup de producteur-trice-s, signifie de devoir recourir à de la main d’œuvre pour la première fois ou d’accroitre les embauches. Les freins évoqués ci-dessus, s’ils ne sont pas adressés, peuvent se transformer en frein à la conversion. C’est particulièrement vrai dans les territoires où peu de main d’œuvre est disponible.

C’est pourquoi les collectivités territoriales peuvent jouer un rôle de premier plan pour répondre à ces enjeux.

Mettre les acteurs autour de la table pour une gestion prévisionnelle des emplois et des compétences territoriales dans la filière agricole

A l’origine portée par les entreprises pour élaborer leur stratégie de recrutement / formation / évolution professionnelles de leurs salariés, la Gestion Prévisionnelle des Emplois et des Compétences (GPEC) est aujourd’hui menée à des échelles territoriales. Le but : élaborer un plan d’action partenarial d’adaptation des dispositifs d’emploi-formation aux besoins existants et à venir d’un territoire et de ses acteurs économiques.

Dans le secteur agricole, il s’agit de mettre autour de la table divers acteurs du territoire pour anticiper les besoins en main-d’oeuvre des fermes et des filières agroalimentaires locales, mobiliser les demandeur-euse-s d’emploi locaux pour répondre à des besoins, en leur permettant d’acquérir les compétences nécessaires (découverte des métiers agricoles, formation initiale agricole, etc.), former correctement les travailleur-euse-s aux nouvelles compétences qui leur seront nécessaires (pratiques bio, polyvalence entre polyculture et élevage, etc.).

Parmi les structures à associer aux démarches de GPEC territoriales, on peut citer :

  • Les producteurs-rice-s du territoire ;
  • Les structures qui les accompagnent (Groupement d’agriculteurs-rices bio, Chambre d’agriculture, syndicats agricoles, CIVAM…) ;
  • Les structures qui accompagnent les demandeurs d’emploi / partenaires de l’emploi (Pôle emploi, Mission locale, Centres sociaux, CCAS…) ;
  • Les groupement d’employeurs / GEIQ (si existant sur le territoire) ;
  • Les acteurs de la formation agricole (EPLEFPA, MFR…) ;
  • Les institutions (DRAAF, département, région…).
 

En Hauts-de-France, plusieurs collectivités se sont saisies des problématiques liées à l’emploi agricole. Le Pays de Sources et Vallées a, par exemple, réuni l’ensemble des acteurs liés par cette problématique emploi dans l’objectif de créer un groupement d’employeurs agricole sur le territoire et ainsi pérenniser la filière fruits rouges qui souffre actuellement de difficultés de recrutement et de reprise des exploitations.

Sensibiliser les agriculteurs et agricultrices du territoire aux solutions d'emploi partagé

Des solutions collectives existent pour faciliter l’embauche, pourtant, l’étude menée en Hauts-de-France a constaté que très peu de producteur-rice-s y ont recours ou ont connaissance de ces opportunités. L’enquête menée nous apprend ainsi que 76 % des producteur-rices bio interrogé-es n’ont pas recours aux services d’un groupement d’employeurs ou d’une CUMA pour embaucher.

Il est donc nécessaire de lancer des actions de sensibilisation à destination des producteur-rice-s pour faire connaitre ces dispositifs d’emploi partagé. Le soutien de la collectivité pour financer, organiser, et relayer ces actions peut être précieux. Pour faire découvrir aux producteurs-rice-s les nombreuses possibilités s’offrant à eux, la sensibilisation peut passer par la présentation des structures proposant des solutions d’emploi partagé et par des visites d’expériences collectives réussies.

LES DISPOSITIFS D’EMPLOI PARTAGE

  • Le Groupement d’Employeurs (GE) agricole a pour vocation de mettre à disposition de ses fermes adhérentes des salariés agricoles qualifiés liés au groupement par un contrat de travail. Le GE peut ainsi permettre aux producteur-trice-s de faire face aux fluctuations de leur activité, à la saisonnalité… Les salariés tournent donc sur plusieurs fermes selon des calendriers définis : chaque semaine, selon les mois de l’année… . Le GE peut aussi apporter à ses membres son aide ou son conseil en matière d’emploi ou de gestion des ressources humaines.
 
  • Le Groupement d’Employeurs pour l’Insertion et la Qualification (GEIQ) fonctionne sur le même principe, c’est-à-dire la mise à disposition des salariés sur les fermes adhérentes ayant des besoins. Mais, contrairement aux groupements d’employeurs classiques, les GEIQ embauchent des personnes n’ayant pas nécessairement de bagage agricole et souhaitant, tout en étant salarié, se former. Ils suivent donc, durant les périodes creuses d’activité, une formation qualifiante.
 
  • Les CUMA (Coopératives d’Utilisation de Matériel Agricole) peuvent désormais, elle aussi, développer l’activité « groupement d’employeurs ». Les salariés peuvent être mis à disposition des adhérent-e-s et travailler sur des missions variées, pas nécessairement liées à l’entretien ou à l’utilisation du matériel de la CUMA.
 

Dans le cas où ces structures de l’emploi partagé ne sont pas présentes sur le territoire, la collectivité peut aussi être à l’origine de leur création. Dans le Pas-de-Calais, la Communauté de Communes Sud Artois, après avoir mené une étude-action visant à évaluer les besoins et identifier les problématiques de qualification sur son territoire, a opté pour la création du GE – GEIQ 3A (pour Agricole et Agro-Alimentaire) pour répondre, entre autre, à la question de la fidélisation de la main-d’œuvre dans les fermes de son territoire.

Soutenir l’organisation de formations pour les producteur-trice-s-employeur-euse-s et pour les salarié-e-s agricoles

Employer demande aux producteur-rice-s des compétences spécifiques, que ce soit en termes de démarches administratives, de réglementation ou de gestion humaine des salarié-e-s. Pour ces raisons, de nombreux producteur-rice-s ne se sentent pas armé-e-s pour assumer ce statut d’employeur. Le développement d’une offre de formation liée au rôle d’employeur, au management d’équipe est l’une des pistes à explorer.

De plus, face aux besoins en personnel qualifié et polyvalent, la formation des salariés agricoles aux spécificités de l’AB vient répondre aux attentes, à la fois des producteur-trice-s bio et de ceux et celles ayant un projet de conversion, mais aussi à celles des salarié-e-s qui souhaitent monter en compétences et évoluer dans leur poste.

 

Dans les deux cas, les collectivités territoriales peuvent contribuer à cibler/adapter les contenus de ces formations au contexte spécifique de leur territoire (suite à une démarche de GPEC territoriale par exemple). Elles peuvent aussi soutenir l’organisation de ces formations sur leur territoire (financements, communication/relais auprès des producteur-trice-s, aspects logistiques).

Au-delà de la formation des producteur-trice-s et salarié-e-s déjà ancré-e-s dans le monde du travail, l’adaptation des contenus de formation initiale aux évolutions du monde agricole est nécessaire pour répondre aux enjeux sociétaux actuels. C’est pourquoi, les structures d’enseignement agricole initiale, lorsqu’elles existent sur un territoire, sont à associer à la démarche !

Améliorer la disponibilité de la main d'oeuvre locale en permettant aux demandeurs et demandeuses d'emploi de découvrir les métiers des filières bio

Afin de répondre aux besoins grandissant de main d’œuvre dus à l’augmentation du nombre d’exploitations bio, il semble évident que les partenaires de l’emploi (Pôle Emploi, mais également toutes les structures émanant des collectivités territoriales, CCAS, centres sociaux, Missions locales) ont un rôle à jouer.

Pour toucher le public demandeur d’emploi, sensibiliser les personnes qui les conseillent et les accompagnent aux opportunités de la filière bio constitue la première étape. Dans un second temps, l’organisation de semaines découvertes des métiers de la bio ou de journées thématiques bio pour être au plus proche de la réalité du terrain permet, aux demandeur-euse-s d’emploi comme à leurs conseiller-ère-s, de mieux appréhender les postes disponibles ainsi que les valeurs et les spécificités de la bio.

L’agriculture biologique est l’un des viviers d’emplois de demain. Pour anticiper les besoins naissants, les partenaires de l’emploi, quels qu’ils soient, ont intérêt à appréhender la diversité des métiers que l’agriculture a à offrir, l’étendue des possibilités de formations agricoles initiales et continues, mais aussi la quête de sens dans le travail motrice pour beaucoup de producteur-trice-s qui passent en bio.

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