Carte d'identité du territoire
Territoire
- Le Havre Seine Métropole
- 54 communes concernées, 270 000 habitants
- Région Normandie, Département de la Seine Maritime, Agence de l’Eau Seine Normandie
- Superficie : 495,80 km2 dont 65% de terres agricoles. 22% de terres artificialisées.
Caractéristiques agricoles
- Productions dominantes : Le territoire de LHSM est composé à 65% d’espaces agricoles constitués d’une majorité d’exploitations en polyculture élevage bovin (lait et/ou viande). On constate un recul de l’élevage au profit des cultures de vente boostées économiquement par les filières exportatrices du port de Rouen. La culture de lin est emblématique du territoire, la fibre étant destinée au marché textile chinois. La culture de la pomme de terre est également très représentée. Le maraîchage demeure ancré en périurbain avec environ 200 hectares de productions diversifiées destinées au marché local.
- 508 exploitations et 784 emplois en 2010.
- Age moyen des chefs d’exploitation : 48,6 ans, 21% sont des femmes.
- Surface agricole utile (SAU) : 26 211 ha dont 642 ha en bio (pour 9 exploitations), soit 2,3% de la SAU en bio, nombre de conversions qui a doublé depuis 2010.
- L’agriculture bio est très peu développée sur le territoire de LHSM, à l’image de la Normandie qui compte en 2016 seulement 4% de sa SAU en bio. Néanmoins les conversions sont en pleine croissance et la Normandie présente des filières bio à fort potentiel : 13 % des volumes de lait de vache bio nationaux sont collectés en Normandie (3ème région de production derrière la Bretagne et les Pays de Loire). La consommation de produits bio est en augmentation sur l’aire urbaine du Havre qui a vu l’implantation récente de grandes enseignes de l’alimentation bio : Naturéo et Biocoop.
- Forte pression foncière : 11 840€ l’hectare, augmentation de 64% entre 2008 et 2018
Actions mises en oeuvre
En 2015, la collectivité s’est engagée dans une stratégie agricole et alimentaire en se positionnant comme animatrice d’une démarche territoriale qui permet de mutualiser/coordonner les interventions des partenaires de la stratégie. Elle propose également d’articuler et de mettre en cohérence les interventions de Le Havre Seine Métropole en direction du monde agricole (actions foncières, protection de la ressource en eau, lutte contre l’érosion et le ruissellement, préservation des espaces naturels, intervention économique, …). Cette stratégie s’appuie sur des actions phares comme l’espace-test agricole en maraîchage biologique lancé en 2015 ou le Fonds FILA qui permet de soutenir financièrement – depuis plus de 10 ans – des projets agricoles. Depuis 2017, cette stratégie s’appuie sur l’animation d’un Projet Alimentaire Territorial qui vise à développer l’approvisionnement alimentaire de qualité et de proximité, à l’aide de l’outil Toile Alimentaire.
Le Havre Seine Métropole, dans le cadre de sa compétence eau, doit être en mesure de garantir la distribution aux habitants du territoire, d’une eau de qualité respectant les seuils limites de pollution. Aujourd’hui, les investissements mobilisés pour le traitement des polluants détectés aux captages ne sont plus suffisants pour corriger les effets des pratiques agricoles passées et actuelles. Les mesures incitatives négociées avec la profession agricole dans le cadre des programmes de protection des captages, qui concernent plus de 30 000 ha d’espaces agricoles (aides financières, accompagnement technique des exploitations volontaires, …) ne sont plus à la hauteur des enjeux. La collectivité doit envisager de nouvelles modalités d’intervention pour encourager les exploitations locales à modifier en profondeur leurs systèmes de production. Dans un contexte de crise climatique et sanitaire, la résilience économique du territoire est un enjeu majeur, notamment en ce qui concerne la sécurité alimentaire.
Accompagnement du changement des pratiques agricoles
Début 2020, une démarche de prospective territoriale a été menée sur les enjeux agricoles et alimentaires sur la base du scénario AFTERRES 2050 à l’échelle des territoires de la Communauté Urbaine Le Havre Seine Métropole, du Parc naturel régional des boucles de la Seine normande et de la Métropole de Rouen. De cette réflexion, inédite à cette échelle territoriale, se dégagent 3 pistes de travail, partagées avec les acteurs du monde agricole, pour accompagner la transition de ce secteur d’activité dans les 30 prochaines années :
- la nécessaire évolution des régimes alimentaires : baisse des surconsommations et des pertes et gaspillage, inversion de la proportion de protéines d’origine animale et végétale, développement de filières locales ;
- le maintien et l’accompagnement de l’élevage bovin vers le développement de pratiques valorisant les surfaces en herbe pour préserver les sols et les ressources en eau ;
- l’évolution des systèmes de cultures vers des pratiques plus agroécologiques notamment via l’agriculture biologique.
Cette étude permet ainsi d’induire un changement par la validation d’un scénario prospectif portant des objectifs fixés qu’il convient d’atteindre.
Adossée à cette étude prospective, la Communauté Urbaine s’est engagée dans un autre type d’étude portée par l’association Bio en Normandie. L’étude Sensibio œuvre à déterminer les freins psychologiques des agriculteurs à la conversion en bio. Menés directement auprès de ces derniers, les entretiens permettent par la suite d’établir un profil psychologique et d’estimer leur potentiel d’évolution concernant l’Agriculture Biologique. Des moyens d’accompagnement adaptés seront ainsi mis en œuvre autour des agriculteurs prêts à engager une transition mais encore hésitants.
Les citoyens questionnent le territoire sur la capacité à produire une alimentation de qualité et de proximité tandis que l’engagement des exploitations locales dans une transition agroécologique pérenne ne sera que plus important si celles-ci peuvent valoriser économiquement des services rendus au territoire. Ces mutations sont une opportunité pour développer l’emploi en milieu rural et doivent être accompagnées par l’ensemble des acteurs de la formation et de l’installation agricole. Pour cela, la Communauté urbaine porte les actions suivantes :
- Création d’un espace-test agricole de production maraichère biologique en 2015
- Accompagnement technique des professionnels agricoles à l’évolution de pratiques (20 formations collectives destinées aux agriculteurs des zones à enjeu eau du territoire de LHSM depuis 2017 sur les thèmes de la gestion des intrants (azote et phytosanitaires), et la gestion des prairies, accompagnements individuels vers des pratiques durables (pour limiter les intrants, optimiser la valorisation de l’herbe, l’autonomie alimentaire des élevages).
- Soutien financier direct de LHSM pour l’acquisition de matériel agricole permettant le changement de pratiques et le développement des circuits courts (LHSM est une des seules collectivités françaises à proposer ce type d’aide) via le dispositif FILA.
- Création de la coopérative d’intérêt collectif (SCIC) La Ceinture Verte en 2022 : création de fermes maraîchères biologiques en zone péri-urbaine. Accompagnement technico-économique des maraîchers installés.
- Dispositif de conseil aux acteurs de l’économie alimentaire :
- Accompagnement des acteurs de la restauration hors domicile à l’introduction de produits locaux, bio et durables et à la lutte contre le gaspillage alimentaire (Conseil en alimentation proposé par LHSM dans le cadre du Projet Alimentaire Territorial).
- Accompagnement pour dynamiser les circuits courts alimentaires en favorisant les circuits bio.
- Appui à l’émergence de filières biologiques territorialisées dans le cadre d’un dispositif financé par la DRAAF intitulé : animation bio, développement des filières bio territorialisées. Mobilisation d’un groupe d’agriculteurs déjà engagés et création d’un cahier des charges pour un bureau d’études afin de déterminer les filières bio économiquement viables à développer.
- Animation de réseaux de territoires et accompagnement des stratégies des collectivités locales (Territoires engagés pour la Nature/ANBDD, Territoires Eau et Bio/BeN).
Action foncière
En 2011, la Communauté Urbaine a organisé un diagnostic foncier qui a été mené par la SAFER. Ce diagnostic sera renouvelé au cours de l’année 2022 via un diagnostic agricole mené par la Chambre Régionale d’Agriculture de Normandie. Cette étude intervient dans le cadre de la construction du nouveau PLUi de sorte à ce que ce dernier intègre mieux les enjeux agricoles dans la planification. Cet outil sera complété d’une stratégie foncière agricole de territoire. Celle-ci devra considérer l’impact du développement urbain sur l’économie agricole mais aussi la manière dont la collectivité peut intervenir sur l’espace rural pour favoriser le maintien d’une agriculture respectueuse des ressources locales, des paysages et de la biodiversité.
Cette réflexion sur la planification territoriale devra par ailleurs intégrer une vision long terme prenant en compte les effets des évolutions climatiques sur l’agriculture locale. Afin de mieux connaître les dynamiques foncières du territoire, une cellule d’animation du foncier agricole et rural sera créée. Enfin, adossées à ces outils techniques, le Havre Seine Métropole met également à disposition des agriculteurs des parcelles publiques pour effectuer de l’éco-pâturage ou du fauchage.
Structuration des débouchés
– La restauration collective :
Les flux alimentaires ont pu être identifiés grâce au développement de « La Toile alimentaire » développée en partenariat avec l’Agence d’Urbanisme de la Région Havraise (AURH). Cet outil permet de cartographier les flux et échanges entre acteurs de l’économie alimentaire du territoire et par conséquent d’identifier les débouchés des produits locaux. Associée à l’accompagnement des acheteurs de la restauration collective porté par la Communauté Urbaine, les cantines scolaires bénéficient d’une expertise technique pour améliorer la qualité de leur approvisionnement tant en produits locaux que biologiques. Trente-six communes ont ainsi été accompagnées dans la transition de leurs achats. Ce dispositif sera élargi aux autres restaurations collectives notamment hospitalières ou privées durant le premier trimestre 2022.
– L’offre et la distribution de produits locaux sur le territoire :
Par ailleurs, à la suite d’une publication du Comité de Développement local, la Communauté urbaine a identifié une forte demande de produits locaux de la part des consommateurs. Les circuits-courts de produits locaux sont encore mal connus de ces derniers et ne constituent qu’une faible présence dans les communes rurales. Afin d’œuvrer à la consolidation du réseau de commercialisation des productions locales, la Communauté Urbaine s’engage actuellement dans un projet d’accompagnement des commerces de proximité afin d’augmenter leur offre de produits locaux. Cet accompagnement sera également proposé aux communes sans commerce pour accueillir des magasins de producteurs afin de valoriser l’activité agricole locale et de fournir ses habitants en produits locaux et de qualité. Enfin, cette activité de conseil est également élargie aux producteurs eux-mêmes afin d’encourager la mutualisation de la distribution de leurs produits et par conséquent d’augmenter leur visibilité sur le territoire. En outre, un plan d’action spécifique sur les filières biologiques territorialisées est également en élaboration.
– La transformation alimentaire :
Forte de son industrie portuaire et des flux qu’elle apporte, Le Havre Seine Métropole possède des unités de transformation notamment autour des spiritueux et du café. Afin d’élargir cette transformation à l’alimentaire, la Communauté Urbaine s’est engagée dans la création d’un hôtel d’entreprises agro-alimentaires de sorte à stimuler l’activité sur le territoire. Cette structure permettra à des structures de taille moyenne de transformer les produits locaux et de conserver cette valeur ajoutée sur le territoire.
Communication, sensibilisation, visibilité
Afin d’œuvrer à la diffusion des produits locaux et d’encourager la population à leur consommation, Le Havre Seine Métropole a produit un guide de la vente directe à destination du grand public permettant de recenser les points de vente de ce type de produits. La série de vidéos #BienmangerauHavre publiée sur la plateforme Youtube et les réseaux sociaux a, elle, mis en valeur l’engagement des acteurs de l’économie alimentaire pour une alimentation de qualité et locale. Enfin, des expositions photos et des témoignages d’agriculteurs ont été diffusés lors d’éditions du LH Forum afin de sensibiliser la population au métier et à ses enjeux.
A ces initiatives en direction du grand public s’ajoutent des actions de communication à destination des acteurs économiques, principale cible de la stratégie. Le pôle agriculture et alimentation anime en effet un réseau de plus de 600 acteurs du PAT répartis sur le territoire via les « Rencontres des Pros du PAT » ainsi qu’une newsletter qui relaie les évènements locaux et les dispositifs d’aides existants. En outre, afin de procéder à la mise en visibilité des agriculteurs s’engageant dans une démarche de réduction des produits phytosanitaires, la Communauté Urbaine remet à ces derniers des panneaux à installer à l’entrée de l’exploitation. Par ce biais, les passants ainsi que les agriculteurs des exploitations voisines sont informés de la démarche du producteur. Enfin, afin de procéder à la diffusion des initiatives durables, l’Agence Normande de la Biodiversité et du Développement Durable (ANBDD) organise des visites d’exploitation permettant d’effectuer du retour d’expérience et d’acculturer autant les techniciens du territoire, les élus locaux que d’autres agriculteurs.
Perspectives du territoire bio pilote
Concernant les perspectives d’évolution, la collectivité s’attend à une augmentation de sa Surface Agricole Utile (SAU) en agriculture biologique sur le territoire grâce aux tendances actuelles et à son plan d’actions spécifique. Par ailleurs, avec l’accompagnement des filières locales, leur implantation et développement devrait être renforcé et notamment permettre un maintien de l’élevage de qualité grâce à la filière race normande. Au travers de sa stratégie de protection de la ressource en eau et des actions conjointes avec le pôle agriculture et alimentation, un maintien, si ce n’est une légère augmentation, des surfaces en prairie permanentes est ainsi attendu.
C’est à refaire
– La Toile Alimentaire : mise à jour de cette dernière afin de bénéficier d’un diagnostic complet et continu sur les évolutions du territoire.
– Les Rencontres des Pros du PAT : les temps de mobilisation sont très enrichissants pour la collectivité et essentiels à la mobilisation des acteurs de l’économie alimentaire locale.
– La mise en place de dispositifs complets, dédiés à des problématiques comme celui développé pour la restauration collective qui permet de réaliser un diagnostic, une construction d’outils, la définition des actions à mettre en place, une évaluation des améliorations, un bilan et enfin d’établir des perspectives.
Contacts
Charlotte de Soyres, Chargée de projet alimentation